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L’exclusion est une arme de destruction massive

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L’exclusion est une arme de destruction massive

Philippe Duhamel

Michèle Audette et Michaëlle Jean

Respectivement sénatrice et ancienne gouverneure générale du Canada. La première prononcera le discours inaugural du Forum sur la diversité et l’inclusion, le 21 avril, alors que la seconde animera la séance plénière qui va clore l’événement, le 22 avril.

Le Devoir, édition du 21 avril 2022, section Idées

 

Plus de 200 personnes, provenant d’une centaine d’organisations, sont rassemblées cette semaine par le Réseau pour la paix et l’harmonie sociale, en partenariat avec le Musée des beaux-arts de Montréal, dans le cadre du Forum sur la diversité et l’inclusion. Une convergence des pratiques pour l’unité d’action. L’intention est un appel à la mobilisation, à l’importance de rallier tous nos efforts, car l’heure est grave. L’exclusion, le racisme dans les mentalités, dans nos entreprises, dans le milieu du travail, jusque dans nos institutions publiques, d’où la qualification de « systémique », qui dérange, mais qui n’en est pas moins réelle et dramatique, minent et détruisent des vies.

Nos pensées vont à Joyce Echaquan, à ses enfants, à son époux et à ses proches, et à combien d’autres encore.

Les faits accablants sont depuis longtemps étalés, dans nombre de rapports et d’enquêtes. Les listes des plaintes, des offenses et des traitements inéquitables s’allongent. Mais le déni persiste, jusqu’au plus haut niveau, parfois jusqu’à l’insulte, car demander à celles et ceux qui en témoignent de se taire en est une.

Mais qu’à cela ne tienne, nous qui signons ici ensemble et participons à la réflexion, avec un même et profond sentiment d’urgence, estimons que la fin de non-recevoir fait partie du problème et l’aggrave. L’exclusion est une violence. Il faut prendre conscience des impacts dévastateurs.

Nous sommes, toutes deux, de ces populations les plus éprouvées par cette violence qui affecte principalement et gravement les communautés autochtones et les communautés noires. Les données recueillies par Statistique Canada le confirment.

Voyez qui parle, direz-vous, l’une a été la 27e gouverneure générale du Canada, l’autre est sénatrice. Détrompez-vous, nous avons vécu la discrimination et l’exclusion dans notre chair, sur tout notre parcours, nous en connaissons la morsure et l’humiliation, et il nous arrive encore, et à nos enfants également, d’en ressentir l’indignation et la colère.

Nous avons aussi des yeux pour voir, nous prenons le temps d’entendre et les mots ne nous manquent pas pour dire ce qui marginalise, met en danger, expose à tous les risques, brise des rêves et des aspirations, produit la honte, jette dans un sentiment d’impasse, désespère et fait mourir.

Combien de fois nous a-t-il fallu nous reconstruire ? Nous, les dépossédés de tout, y compris de notre humanité, que le colonialisme a cherché à décérébrer, nous qualifiant de sauvages, de brutes et de biens meubles, en somme, clairement, d’une race inférieure ? Nous avons malgré tout résisté et survécu. Nous connaissons la force de nos combats et de nos accomplissements. On ne sort cependant pas indemne de ces siècles d’ignominie. Et le racisme d’aujourd’hui dit encore celui d’hier. Croyez-nous, il est là, y compris dans ces institutions qui nous tiennent à l’écart et qui bafouent nos droits.

Jamais rien sans nous

Éradiquer ces situations que nous n’avons de cesse de décrire et d’expliciter et, sachez-le, cela très souvent nous épuise, doit être l’affaire de tout le monde, y compris des pouvoirs et des décideurs. Mais ce que nous demandons, c’est : jamais rien sans nous. Jamais rien sans tenir compte de ce que nous vivons et de notre façon de l’exprimer.

D’autant plus que le coût social de l’exclusion est un déficit majeur pour l’ensemble de la société. Un déficit de justice et de participation. Un déficit d’idées et de perspectives. Un déficit d’énergies et de synergies constructives. Un déficit d’actions et de responsabilité. Un déficit de vision et de possibilités. Un déficit de démocratie et de développement sur tous les plans, y compris celui de la croissance économique. Il est temps de comprendre que ce que nous exigeons est en faveur du bien commun et dans l’intérêt général.

Ce que nous disons essentiellement, c’est qu’il nous faut y voir collectivement et surtout courageusement. Les œillères font entrave au dialogue. Penser que nommer le problème est clivant et, par conséquent, irrecevable, c’est passer à côté de tant de sensibilités et de tant de souffrances qui doivent être entendues et dont il faut s’instruire pour mieux agir.

Il nous faut travailler de manière inclusive, collaborative et responsable, organismes communautaires, institutions universitaires, organisations artistiques et culturelles, avec la jeunesse et les femmes militantes, les acteurs des secteurs publics et privés, en priorisant aussi les milieux les plus névralgiques, notamment ceux de la justice, de l’éducation et de la santé. Soyons partenaires, enfin, dans ce combat dont nous aurons toutes les raisons de nous enorgueillir.

Cessons de parler de la « problématique » autochtone ou de la « problématique » des Noirs, des immigrants, des réfugiés, des musulmans, des juifs, des étrangers. Ce dont il est question est affaire de justice, d’humanisme et de projet de société. La diversité est une richesse. Inclure est une somme de valeurs ajoutées.

Source : Le Devoir, édition du 21 avril 2022, section Idées